• y-

    y- comme YTY


    Le petit garçon, vous l'aurez devinez, est mort depuis longtemps maintenant. Et je n'ai pas oublié. Je ne l'ai pas oublié.

    Certaines personnes ne semblent pas faites pour vivre à notre contact. Notre insensibilité les brûle. Notre insouciance les déchire.
    Ce petit garçon en faisait partie. C'était un écorché, un grand blessé.
    Il rêvait d'être capable de s'ouvrir les veines, mais se contentait de coupures sur les doigts ou le visage, comme pour apprivoiser la douleur qui lui brûlait la chair dès que la lame était posée sur la peau et s'enfonçait doucement. Pour être un jour prêt au grand saut.
    En attendant, il avait décidé de rester en vie, planté dans la vie des autres comme le souvenir d'un mort.
    Sombre, solitaire, dangereux. Imprévisible. Le garçon qu'on évitait parce qu'il faisait un peu peur. On remarquait d'abord son pas. Grand, toujours tranquillement décidé, semblant glisser.
    Puis son regard ! Celui d'un homme qui avait vécut bien plus longtemps que les 20 ans affichés. Celui d'un homme qui n'avait rien à perdre, le sait et s'en fiche. Celui d'un homme violent... alors que je ne l'ai jamais vu se battre ! Le regard d'un mort, si cette expression peut avoir du sens.
    Il s'est planté dans la vie des autres garçons comme un truc qui dérange. Il faisait taire leurs conversations quand il rentrait dans une pièce, on évitait son regard, et on n'osait même pas rire après son passage. Jamais je n'ai revu ça !
    Il s'est planté dans la vie des filles quand il leur donnait un poème magnifique avec un moue presque haineuse, sans qu'elles comprennent pourquoi il le faisait et se demandant ce qu'il voulait. Il ne voulait rien, justement. Il n'assassinait la beauté que dans son coeur. (mais ça... pour le savoir...)

    Et un jour, après qu'il m'ait parlé, quand j'ai voulu poser ma main sur sa joue puisque je ne pouvais rien dire devant le gouffre qu'il avait ouvert, il a reculé la tête, et son regard a changé. J'ai compris que quelque chose s'était brisé en lui. Quelque chose qui avait été beau, et qui aurait pu rendre heureuse la fille qui aurait partagé son lit.


    Il est partit un jour, laissant un recueil de poème dans ma boîte aux lettres, certaines lettres soulignées de rouge. J'ai recopié patiemment toutes les lettres, et ça a fait un petit poème.
    J'ai souri parce que ça lui ressemblait tellement cette façon de cacher des trucs dans ses textes. Des accrostiches sur la deuxième ou troisième lettre plutôt que la première, des choses comme ça.
    J'ai pleuré parce que son poème parlait d'une fille qui perdait un ami. Un compagnon. Un amant.

    y- comme Mort-Vérité-Mort. Ses runes.
    Je l'imagine quelque fois à traverser un désert, brûlant de souvenirs, glacé de solitude.
    Et dans mes rêves de lui, je le regarde partir inlassablement. Inlassablement.


    Il y a des êtres qu'on ne devrait pas toucher.




    Bérénice


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :