• Mission : end

    Ben voilà. La semaine est terminée.

    Je me rends compte que j'apprécie de plus en plus ces voyages.
    Je me rends compte que l'équipe de [mysmallcompany] locale m'apprécie.
    Je me rends compte d'un paquet de choses, trop longue liste pour être développée ici. Et pourtant ! Certaines ne doivent pas être oubliées.


    Je me rends compte aussi que je me considère comme un pur étranger dans cette France qui m'a vu naître, grandir. L'impression est étrange, un peu comme l'effet d'un alcool douceâtre et entêtant sur la langue... et la tête. (un peu comme du Bailey's, mais en plus sucré, si vous voyez ce que je veux dire)

    Et comme à chaque voyage, je fais très attention à mes pensées, pour pas qu'elles me détruisent.


    J'ai ouvert une boîte de choucroute. Elle chauffe doucement. L'Eku 28 est sortie. J'aime retrouver ces goûts d'un passé que je maîtrise plus ou moins. Avec le goût, c'est facile. Avec les yeux, c'est plus dur.
    Alors je goûte. pendant ces semaines arrachées, volées, je goûte à tout, reviens sur certaines choses, en explore d'autres, îvre de tant de richesses tout à coup à portée de bouche. Un jour j'ouvre une boîte de conserve, ou un bocal de mets préparé, le lendemain je prépare une salade aux gésiers de canards confits. Je n'ai bien sûr pas trop le temps de cuisiner, alors à la base... ça reste du "canage" (oui, ça vient de "can", en anglais), mais je prends les trucs assez chers, parce que ce n'est pas moi qui paye. De toutes façons, entre un pot de 200g de foie gras à 12 euros, qui me fait deux repas (je suis raisonnable, tout de même, ah ah ah), et deux repas au resto... ma compagnie y gagne. Et moi aussi.


    J'apprivoise mon passé par le goût, doucement, et avec haine aussi parfois, quand je me refuse à laisser le reste de la bouteille pour le lendemain, voire simplement plus tard. Je sais que c'est de la haine, un truc brutal et viscéral, mais je ne sais pas encore contre qui. Moi, elle, ou eux (enfin surtout elle. Surtout. Et de la pitié pour lui).

    Les odeurs, par contre, sont comme des rochers sous l'eau. Si l'eau n'est pas assez profonde... Mais sinon, ce petit parfum de printemps (saison que pourtant je hais), avec ce bourdonnement d'insectes, ces idées de fleurs qui naissent dans la tête au moindre souffle de vent chaud...
    Mais très vite elle revient hanter ma vue, avec ces cheveux blonds cendrés, ses yeux de la couleur du ciel après la pluie, et la caresse de ses cheveux sur ma joue.
    Je dois alors me dominer pour ne pas sauter sur le premier venu et lui éclater la tête sur le trottoir ou sur le coin d'une table. De tuer un quidam à défaut de la tuer elle. Alors qu'elle est déja morte, je le sais bien.
    Je le sais bien...
    Je le sais bien mais c'est pas la peine de me le rappeller, comme ça, tout le temps, avec ce mauvais rictus sur les lèvres, comme pour dire que de toutes façons elle était ... etc.
    P***** que je vous hais aussi quand vous dites ça ! P***** que j'ai envie de vous mettre mon poing dans la figure !
    P***** que j'ai mal... Vous ne pouvez pas imaginer...

    Je marche sur la corde raide, comme on dit, pendant une semaine, à chaque voyage. Le long d'un abîme. Et je me sens tout seul, avec personne pour me tenir la main quand je glisserai - si jamais je glisse. Et ça aussi c'est grisant.


    Mais c'est très bien ainsi.
    Quelle belle Haine que celle qui consiste à haïr sa propre mort !

  • Commentaires

    1
    Mardi 16 Mai 2006 à 06:42
    J'ai bien
    aimé cette promenade du goût très bien amenée... Il est très tôt et pourtant ton billet à mis mes pap-illes en émoi. Sourire. La fin est très émouvante, elle m'a secouée : ta douleur... cette haine... la mort... l'envie de tuer... la rage... la solitude... Je me suis sentie "voyeuse" dans le mauvais sens du terme. Je ne sais comment terminer ce commentaire, simplement... A bientôt :-)
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